China in miniature, or a selection of the costumes, arts and crafts of said empire

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China in miniature, or a selection of the costumes, arts and crafts of said empire
La Chine en miniature, ou choix de costumes, arts et métiers de cet empire
WF00032
Western
French
Jean Baptiste Joseph Breton de La Martinière (1777-1852.0)
3: 38-53
1811
Paris: Nepveu
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NOTICE

Sur les Drames et Représentations théâtrales des Chinois.

Dans les spectacles chnois, l’orchestre est toujours placé au fond de la
scène, et par conséquent, exposé à la vue de tous les assistans. Cette
disposition n’est guère propre à produire de l’illusion, ni à augmenter
l’intérêt de la pièce.

Le théâtre est toujours d’une grande simplicité, et les décorations
exigent peu de frais. La raison en est, que la Chine est remplie de
comédiens ambulans, qui, comme les héros du roman comique de Scarron,
transportent sur une charrette toutes les décorations et le bagage de la
troupe ; les particuliers riches qui donnent des fêtes à leurs amis, les
font venir chez eux, le théàtre est établi en un clin-d’œil dans un coin
de la salle du festin.

Il n’y a pas, même dans la Capitale, de salle permanente de comédie ;
les habitans d’un quartier qui veulent se donner le plaisir du
spectacle, se cottisent entre eux pour subvenir aux frais de la
construction d’une salle. Ce théâtre construit avec des claies de bambou
exige peu de dépenses ; c’est tout simplement un hangar élevé de six à
sept pieds au-dessus du sol, fermé de trois côtés, et recouvert avec des
nattes. Les spectateurs se placent en plein air du côté où se trouve
l’ouverture.

Le spectacle de la Cour, auquel assista l’Ambassadeur anglois en 1793,
présentoit l’aspect d’un édifice élégant à plusieurs étages ; il y avoit
trois théâtres l’un au-dessus de l’autre : vis-à-vis de celui d’en-bas,
étoient des loges profondes pour les hommes, et au-dessus de ces loges,
dans un enfoncement, des galeries grillées pour les femmes, qui
pouvoient voir sans être vues.

Une troupe de comédiens n’excède presque jamais sept ou huit acteurs ;
ils économisent le nombre des sujets, en faisant jouer par le même
acteur deux ou trois personnages différens. Il n’en résulte aucune
confusion, non seulement parce que le costume n’est pas le même, mais
parce que tout acteur, en entrant sur la scène, expose le nom et le
sujet du rôle qu’il va remplir. Ils n’ont point d’actrices ; les rôles
de femmes sont remplis par des jeunes gens imberbes, si bien travestis,
qu’on se méprendroit sur leur sexe, si l’on n’étoit prévenu.

Les pièces principales du théâtre chinois, et les plus estimées, sont
tirées de l’ancienne historie de l’Empire : la plus célèbre est
l’Orphelin de la Maison de Tchao, traduite, ou plutôt imitée en françois
par le P. Prémare (1), et d’où Voltaire a Voltaire a tiré sa tragédie de
l’Orphelin de la Chine. La conduite de ce drame est des plus
singulières, pour ne pas dire, extravagante ; le dénouement de la pièce
s’opère par le moyen d’un chien. « Il est vrai, dit M. Barrow, que la
catastrophe est mise en récit et non en action, le goût chinois n’ayant
pas été assez dépravé, du moins en cette occasion, pour introduire sur
la scène un personnage à quattre pattes ». (2)

(1) Ce Jésuite Prémare aimoit à se distinguer par des idées originales ;
il prétendoit que les Egyptiens avoient fait autrefois la conquête
de la China, et trouvoit dans les noms des Empereurs chinois ceux
des Rois d’Egypte, dénaturés par une prononciation vicieuse.

(2) Les autres repoches de M. Barrow sur la pièce de l’Orphelin, tombent
plutôt sur la traduction du jésuite Prémare, qu’il appelle un
pitoyable ouvrage, que sur l’original en lui-même. Ainsi, M. de
Guignes a eu tort de dire que M. Barrow étoit en contradiction avec
lord Macartney, lequel assure que l’Orphelin peut être considéré
comme une preuve avantageuse de l’art de la tragédie des Chinois. 

L’unité de temps est si peu observée, que, suivant le même auteur, une
pièce chinoise comprend quelquefois les événemens de tout un siècle, et
même l’histoire d’une dynastie qui auroit occupé le trône plus de deux
cents ans.

De même que sur le théâtre des Grecs on voyait des chœurs de guêpes et
d’oiseaux, les acteurs chinois prennent souvent des figures d’animaux et
même de productions inanimées de la terre et de la mer. Ces animaux, ces
arbres et ces poissons prononcent des discours, et ont entre eux de
longs dialogues.

Les décorations restent les mêmes pendant toute la pièce, ce qui
n’empêche pas que l’on se suppose de fréquens changements de lieu. Si un
Général est censé partir pour une expédition éloignée, il monte à cheval
sur un bâton, et fait deux ou trois fois le tour du théàtre en chantant
et faisant claquer son fouet. Enfin, il s’arrête, et le voyage est
supposé achevé. Si l’on veut figurer l’assaut d’une ville, au lieu de
murailles, on fait placer au milieu du théâtre un rang de soldats qui
représentent le rempart, et que les assaillans doivent franchir.

Les Anglois ont vu au théâtre de la Cour une pantomime représentant le
mariage de la Mer et de la Terre. Cette dernière divinité montrait ses
richesses et ses productions diverses, telles que des dragons, des
éléphans, des tigres, des aigles, des autruches, des chênes, des pins,
et plusieurs espèces d’arbres. L’Océan étaloit, de son côté, des
baleines, des dauphins, des marsouins, et autres monstres marins, ainsi
que des vaisseaux, des rochers, des coquillages, des coraux et des
éponges : tous ces objets étoient figurés par des acteurs cachés sous
des toiles, et qui jouoient fort bien leur rôle. Le deux troupes de
productions terrestres et marines firent le tour du théâtre, et se
réunirent enfin, puis s’ouvrirent à droite et à gauche pour laisser
passer une énorme baleine : ce monstre marin se plaça justement devant
l’Empereur, et fit jaillir de son large gosier plusieurs muids d’eau qui
inondèrent les spectateurs placés dans le parterre ; mais ils
disparurent bientôt par des trous pratiqués dans le plancher : ce
badinage fut vivement applaudi par les spectateurs.

M. de Guignes donne l’analyse d’une autre peèce nommée la Tour de
Sy-Hou, en des termes dont voici la substance :

Des Génies, montés sur des serpens, ouvrirent la scène en se promenant
autour d’un étang. Une Déesse (ou plutôt une Fée), devenue amoureuse
d’un Bonze, malgré le représentation de sa sœur, l’épousa, devint
grosse, et accoucha, en plein théâtre, d’un enfant qui bientôt se trouva
en état de marcher. Les Génies, furieux de l’incontinence du Bonze, le
chassèrent, et foudroyèrent la tour.

Les à-parte, dont l’usage est déjà abusif sur notre théâtre, sont
supportés sur celui des Chinois. Un acteur est à côté d’un autre acteur
sans être censé le voir, parce qu’on suppose qu’ils sont séparés par un
arbre ou une muraille. Pour faire voir que l’on entre dans un
appartement, on fait semblant d’ouvrir une porte, et d’en franchir le
seuil, quoiqu’il n’y ait pas le moindre vestige de porte, de muraille,
ni de maison.

Quelques – unes des comédies chinoises, celles particulièrement que l’on
joue à Canton, sont d’une grande indécence, et offrent les détails les
plus révoltans. Dans une de ces pièces, on voit une femme qui a
assassiné son mari, condamnée à être écorchée vivante : la femme
reparoît après l’éxécution de la sentence ; elle est toute nue, et
semble entièrement écorchée. L’acteur qui joue ce rôle, a sur la peau
des vêtemens si minces, si bien tendus, qu’ils présentent, à s’y
méprendre, l’aspect hideux d’un corps humain dépouillé de sa peau.

Lorsque les comédiens ambulans sont appelés dans une société, ils font
choisir par le convive le plus notable, celle des pièces de leur
répertoire dont il desire la représentation. Si, par hasard, il y avoit
dans cette comédie un personnage odieux, dont le nom seroit le même que
celui d’un des spectateurs, on en avertiroit, et l’on feroit choix d’un
autre drame.

Tel est le goût des Chinois pour les spectacles, que ceux de leur nation
établis à Batavia, se donnent fréquemment ce plaisir. Ils ont des
comédiens ambulans qui jouent sur des charrettes et rappellent l’enfance
du théâtre des Grecs, les premiers essais de Thespis et de ses associés.
Le mot de tragédie signifie, comme on sait, le Chant du Bouc, parce
qu’un Bouc étoit le prix que l’on donnoit à la meuilleure production en
ce genre, ou peut-étre le salaire que demandoient les comédiens.

On lit dans un nouveau voyage à la Chine, par Jwan-Jwanow-Tschudrin,
Russe de naissance, et que des circonstances trop longues à rapporter
ici, avoient fait passer en Chine pour un naturel Chinois, les détails
suivans à l’occasion des spectacles. (1)

(1) Ce voyage n’a point encore paru ; on n’en connoît qu’un fragment qui
a été publié par M. Kotzebue, et dont j’ai donné la traduction dans
ma collection des romans et mélanges du même auteur, en six volumes
in-12. M. Kotzebue prétend que l’original qu’il a en langue russe,
contient vingt-deux cahiers divisés chacun en dix ou douze
chapitres. Le passage qu’on va lire tiré du septième cahier,
chapitre III.

« Après que nous fûmes placés à table, il entra dans la salle cinq
comédiens richemens vêtus. Ils nous firent de grandes révérences en
baisant le front jusqu’à terre, à peu près comme les paysans russes le
pratiquent devant leur signeurs. Un d’eux s’approcha du principal
convive, et lui présenta une longue liste sur laquelle étoient écrits,
en caractères d’or, les titres de cinquante ou soixante pièces de
théâtre, qu’ils étoient en état de jouer, en le priant civilement d’en
choisir une. Le premier convive refusa poliment l’invitation ; il les
renvoya au second ; le second au troisième ; celui-ci au quatrième, et
ainsi de suite jusqu’au bout de la salle.

Le catalogue demeura dans mes mains quelques secondes ; j’y jetai les
yeux ; le reconnus plusieurs pièces dans lesquelles j’avois autrefois
joué un rôle, lorsque je faisois moi-même partie d’une troupe ambulante.
Je rougis et tremblai d’être reconnu ; mais heureusement il ne se
trouvoit parmi ces histrions ni les convives, personne qui eût été, soit
mon camarade, soit le témoin des exercices de ma profession.

La liste revint de mains en mains dans celles due principal convive ; il
fallut bien qu’il prit un parti : il parcourut de nouveau les titres, et
montra du bout du doigt une pièce qu’il jugea propre à divertir la
compagnie. Le comédien fit une révérence, et bientôt après, le
spectacles commença. »